Déclaration des biens immobiliers : en 2025, les grands propriétaires sous pression du fisc

Depuis la suppression de la taxe d’habitation, les propriétaires doivent déclarer les occupants de leurs logements. Une obligation mise en place pour permettre à l’administration fiscale d’identifier les logements encore assujettis à certaines taxes, comme celles sur les résidences secondaires ou les logements vacants. Mais face aux nombreux dysfonctionnements rencontrés depuis 2023, l’État entend désormais sévir, en ciblant particulièrement les grands propriétaires immobiliers.
Une réforme marquée par des débuts chaotiques
Lancée en 2023 via la plateforme « Gérer mes biens immobiliers », cette obligation déclarative avait très mal démarré. Entre incompréhensions, communication défaillante, et surcharge des services fiscaux, le dispositif avait provoqué de nombreux ratés. Plus d’un million de contribuables avaient été imposés à tort, obligeant l’État à procéder à 1,3 milliard d’euros de dégrèvements. Un échec sévèrement pointé du doigt par la Cour des comptes et diverses organisations syndicales.
Malgré un investissement conséquent de 56,4 millions d’euros sur cinq ans pour développer cette plateforme, les résultats n’étaient pas à la hauteur. Face à ce fiasco, les pouvoirs publics ont tenté de rectifier le tir lors des campagnes de déclaration suivantes.
Intégration à la déclaration de revenus et taux de participation en hausse
Depuis 2024, la déclaration des occupants a été intégrée à la campagne de l’impôt sur le revenu, facilitant les démarches pour les propriétaires. Cette année, la campagne s’étale du 11 avril jusqu’à fin juin, avec un taux de déclaration en progression : environ 90 % des propriétaires ont déjà déclaré la situation de leurs biens, selon François Rollo, responsable à la Direction générale des finances publiques (DGFiP).
Les petits propriétaires (détenant moins d’une dizaine de biens) affichent des taux de déclaration élevés : 82 % en 2023, 88 % en 2024. En revanche, les grands propriétaires – ceux possédant plus de 200 biens – restent à la traîne. En 2023, seuls 45 % d’entre eux avaient rempli leurs obligations, un chiffre remonté à 78 % en 2024, mais encore insuffisant selon l’administration.
3.000 grands propriétaires dans le viseur
Bailleurs sociaux, collectivités locales, banques, promoteurs ou sociétés civiles immobilières (SCI) : la France compte environ 3.000 grands propriétaires immobiliers. Quelques centaines d’entre eux concentrent à eux seuls environ 70 % du parc immobilier concerné. Ces acteurs, peu enclins à déclarer ou à connaître précisément les occupants de leurs logements, sont désormais dans le viseur du fisc.
Selon Olivier Touvenin, chef du service de gestion fiscale à la DGFiP, certains grands propriétaires déclarent « n’importe quoi », voire rien du tout. Des sanctions vont donc être appliquées dès 2025 : une amende forfaitaire de 150 euros par bien non déclaré ou mal déclaré pourra être infligée à ces contrevenants.
Collectivités locales : un point noir persistant
Parmi les mauvais élèves, les collectivités locales se distinguent particulièrement. En 2024, seulement la moitié d’entre elles avaient correctement déclaré la situation d’occupation de leurs biens. En cause : une méconnaissance de leur propre patrimoine, ou encore la difficulté à identifier les occupants de locaux gérés par des tiers (casernes, logements de fonction, etc.).
Pour y remédier, l’État a autorisé en 2025 la délégation de la déclaration aux gestionnaires effectifs des lieux, une mesure censée simplifier les démarches.
Vers une pression accrue mais ciblée
Les petits propriétaires, en revanche, ne seront pas concernés par ces sanctions financières en 2025. Le fisc privilégie une approche pédagogique avec cette catégorie, considérée comme globalement respectueuse de ses obligations. L’objectif est clair : concentrer les efforts de redressement sur les grands détenteurs de patrimoine, dont les manquements peuvent avoir des conséquences lourdes, notamment pour les locataires injustement imposés.
Au-delà de la sanction financière, le fisc souhaite rappeler que le véritable enjeu reste la justesse de l’imposition et la fiabilité des données déclarées, essentielles pour un système fiscal plus équitable et plus efficace.